Jacques Roy —

Décision sur la conduite professionnelle

Qu'est-ce qu'une décision sur la conduite professionnelle?

Le BSF ouvre une enquête sur la conduite professionnelle d'un syndic autorisé en insolvabilité (SAI) lorsqu'il dispose d'information laissant croire que le SAI n'a pas rempli adéquatement ses fonctions, n'a pas administré un dossier comme il se doit ou n'a pas respecté la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (LFI).

Dans certains cas, les conclusions de l'enquête sont suffisamment graves pour donner lieu à une recommandation de sanction visant la licence d'un SAI [annulation ou suspension de la licence en vertu du paragraphe 13.2(5)] ou imposition de conditions ou de restrictions en vertu du paragraphe 14.01(1) de la LFI.

La décision sur la conduite professionnelle est assimilée à celle d'un office fédéral et peut faire l'objet d'un examen judiciaire par la Cour fédérale.

Canada
District de faillite
de la province de Québec

Dans l'affaire du dossier disciplinaire du syndic Jacques Roy

Requérant :
Jacques Roy, syndic

Intimé : Marc Mayrand, surintendant des faillites


Devant l'Honorable Lawrence A. Poitras, c.r.
Délégué du Surintendant des faillites

Décision sur les demandes opposées des parties


Le , une plainte était déposée auprès du Bureau du surintendant des faillites concernant l'administration du syndic, requérant.

Le soussigné (en remplacement de feu Me François Rioux) fut nommé délégué du surintendant des faillites Marc Mayrand, intimé, aux termes d'une délégation de pouvoir souscrite le conformément à l'article 14.01(2) de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (L.F.I.).

Le , le syndic-requérant s'adressait au soussigné par voie d'exception préliminaire afin de faire déclarer inopérants les articles 14.01, 14.02 et 14.03 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (L.F.I.) à son égard.

Requête en irrecevabilité

Par voie de requête en irrecevabilité de l'exception préliminaire présentée verbalement au nom de l'analyste, ce dernier plaidait que le délégué, le soussigné, n'avait pas compétence pour apprécier la compatibilité des articles 14.01 et 14.02 L.F.I. avec la Charte canadienne des droits et libertés et la Déclaration canadienne des droits. Par décision prononcée le 10 décembre 2003, le soussigné rejetait l'exception en irrecevabilité formulée par le procureur de l'analyste et déclarait disposer de la compétence nécessaire pour entendre la requête du requérant pour faire déclarer inopérants les articles 14.01, 14.02 et 14.03 L.F.I. et pour arrêt du processus disciplinaire du syndic-requérant.

Siégeant comme tribunal administratif, le délégué était implicitement autorisé à disposer des questions de droit qui lui étaient soumises et avait compétence pour se saisir de la requête par voie d'exception préliminaire du requérant dans la mesure où la requête visait les droits du requérant dans la cause dont était saisi le délégué.

L'exception préliminaire

La requête par voie d'exception préliminaire du syndic-requérant du fut donc débattue devant le soussigné les  et .

Par décision prononcée le , la requête par voie d'exception préliminaire du requérant pour faire déclarer inopérants les articles 14.01, 14.02 et 14.03 L.F.I. fut rejetée. La cause devait donc être entendue au fond dans les meilleurs délais.

Le , le syndic-requérant Roy s'adressait à la Cour Fédérale du Canada afin de faire renverser la décision du sur l'exception préliminaire du syndic-requérant. À moins que la Cour Fédérale n'en ordonne la préséance, il est douteux que l'appel soit entendu avant l'année 2005.

La demande des parties

Le , les deux parties, par leurs procureurs, se présentèrent devant le soussigné. L'analyste principal, malgré un appel par le Procureur Général du Canada à la Cour Fédérale à l'encontre d'une décision rendue dans le même sens en tant que délégué dans l'affaire Sam Lévy par l'honorable Fred Kaufman c.r., déclarant qu'il disposait de la compétence nécessaire pour entendre la requête du syndic Lévy pour faire déclarer inopérants les articles 14.01, 14.02 et 14.03 L.F.I. et pour arrêt du processus judiciaire du syndic et malgré l'appel interjeté par le syndic-requérant dans cette cause le à l'encontre de la décision du soussigné rejetant sa demande de déclarer inopérants les articles 14.01, 14.02 et 14.03 L.F.I., demanda que la cause au fond procède devant le soussigné dans les meilleurs délais. Le syndic-requérant Roy, au motif que la Cour Fédérale ne s'était ni prononcée dans l'affaire Sam Lévy sur la compétence du délégué pour entendre la susdite requête de Lévy ni sur l'appel interjeté par le syndic-requérant à l'encontre de la décision du soussigné rejetant sa requête pour faire déclarer inopérants les articles 14.01, 14.02 et 14.03 L.F.I., fit valoir que cette cause ne saurait être entendue au fond tant et aussi longtemps que la Cour Fédérale ne se serait d'abord prononcée sur les deux requêtes.

D'ajouter le syndic-requérant, si la Cour Fédérale accueillait les moyens d'appel présentés par l'intimé, il serait approprié « eu égard aux circonstances et à l'équité » d'ajourner l'audition au fond à une date ultérieure afin de permettre aux parties de faire progresser le dossier en Cour Fédérale sur la compétence du délégué et d'éviter de forcer le requérant à se soumettre à la juridiction d'un tribunal administratif dont l'intimé avait contesté lui-même la compétence en la matière.

Causes pendantes

Le procureur du syndic-requérant s'est même engagé à formuler une demande de préséance sans délai devant la Cour Fédérale afin que les divers appels, y compris l'appel d'une décision de l'honorable Perry Meyer dans l'affaire Jean-Guy St-Georges, dans le même sens que celle rendue sur l'exception préliminaire par le soussigné, soient entendus ensemble et dans les meilleurs délais.

Dans l'affaire Sam Lévy, l'honorable Fred Kaufman, aux motifs que la Cour Fédérale était saisie de l'appel du Procureur Général du Canada à l'encontre de sa décision qu'il disposait de la compétence nécessaire pour entendre la requête du syndic sur la compatibilité des articles 14.01, 14.02 et 14.03 L.F.I., que la durée de la cause au fond pourrait facilement dépasser quatre semaines et que, dans l'entre-temps, le syndic avait été enjoint de ne se saisir d'aucun nouveau dossier, a décidé de remettre l'audition de la cause à une date ultérieure.

Dans une autre affaire semblable, impliquant les syndics Sheriff et Segal, le juge Kaufman, par décision rendue le , promit de fixer la date d'audition au fond de la cause à la fin du mois de juin alors que la Cour Fédérale pourrait se prononcer sur la compétence du surintendant dans cette cause.

La cause impliquant les syndics Sheriff et Segal ne devaient durer que deux semaines et leurs activités n'étaient aucunement restreintes.

Raisonnement

Le soussigné, dans les circonstances de cette cause, doit-il accorder la demande du syndic-requérant de suspendre la suspension des articles 14.01 et 14.02 L.F.I. jusqu'à la décision de la Cour Fédérale sur la constitutionalité de ces dispositions? En se rendant à la demande du syndic requérant, le délégué, malgré sa décision du , agirait-il comme si les articles 14.01 et 14.02 L.F.I. étaient inopérants tant et aussi longtemps que la Cour fédérale ne se serait prononcée sur leur constitutionalité?

Pourtant la constitutionalité de ces articles a déjà été reconnue par la Cour d'Appel du Québec dans l'affaire Métivier c. Mayrand, le , C.A.Q. (200-09-004077-027).

Au surplus, Mes Roger Tassé, François Rioux et Jean-Claude Demers, à la lumière des arrêts dans Manitoba (Procureur Général) c. Metropolitain Stores Ltd. [1987] 1 R.C.S. 110, et de RJR-MacDonald Inc. c. Le Procureur général du Canada, [1994] 1 R.C.S. 311, ont refusé la demande de suspension qui leur avait été présentée dans chacune des causes (dont celle-ci) qui leur avaient été confiées, au motif qu'aucune décision n'avait été rendue déclarant inopérants les articles en question et que le principe de la constitutionalité des lois devait être respecté.

Par jugement rendu le , l'honorable Pepita G. Capriolo de la Cour supérieure du Québec (500–05–071751–026) abondait dans le même sens que Me Rioux, concluant que « la prépondérance des inconvénients favorise donc la continuation des procédures ». Sa décision fut affirmée par la Cour d'Appel.

Nous nous référons au surplus à notre décision du en la matière.

Selon l'honorable Jean Beetz dans l'arrêt Metropolitain Stores (p. 135), le sursis de l'application d'une disposition législative peut avoir pour effet de priver le public d'une loi dûment adoptée… et de contrecarrer le bien commun.

En vertu de l'article 14.02(2) c, L.F.I., le surintendant, ou son délégué en vertu de l'article 14.01(2) L.F.I., « règle les questions exposées dans l'avis d'audition avec célérité et sans formalisme, eu égard aux circonstances et à l'équité. »

Dans l'arrêt Anheuser-Busch, Inc. c. Carling O'Keefe Breweries of Canada Limited et Registraire des marques de commerce, [1983] 2 C.F. 71, l'honorable Darrel V. Heald décidait, per curiam, qu'en vertu de l'article 44 de la Loi sur les marques de commerce, S.R.C. 1970, chap. T-10, depuis modifiée, « le législateur a clairement voulu que la procédure…; soit sommaire et expéditive » et le registraire n'avait aucun « pouvoir inhérent de prolonger excessivement (les) procédures en imposant une suspension d'instance jusqu'à l'issue » d'autres litiges devant la Cour.

Conclusions

Vu la longueur annoncée de cette cause et tenant compte de l'intérêt public quant à la protection et aux avantages a conférés par la Loi de la faillite et de l'insolvabilité et, en particulier, à l'obligation qui y est prévue de procéder avec célérité, nous fixons l'enquête et l'audition des questions exposées dans l'avis d'audition aux premiers jours auxquels les procureurs se sont dits disponibles, soit du  au , à l'endroit à être précisé par la Greffière des dossiers d'audition.

Montréal, le

L'honorable Lawrence A. Poitras, c.r.
Délégué du surintendant


Le présent document a été reproduit dans sa version originale, telle que fournie par le délégué du surintendant des faillites.